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Hilde Madsen
- D 00 092012 36 04 D -

Hilde Madsen

En bref

Féminin
Pseudo : Nii'
Messages : 99




I wanna know, was I the one
Or just the chick on the side ?
I gave it all,
Broke down my walls ;
You dare say I didn't try.
But you won't stop
Telling me what
You think I want to know ;
I'm rejecting the sight of you,
Deleting the thought of you,
Record this and watch me go.
Nom : Madsen.
Prénom : Hilde.
Surnom : Dude.
Genre : Féminin.
Âge effectif : 20 ans.
Âge apparent : 20 ans.
Arrivé depuis : Vient d'arriver.
Date de naissance : 05/09/1992
Date de mort : 18/09/2012
Orientation sexuelle : Homosexuelle.
Groupe : Commotus.
Nationalité : Danoise.
Langues parlées : Danois, anglais, allemand approximatif.
Ancien métier : Études de mécanique.
Métier actuel : SMF.
Casier Judiciaire


▬ Crimes commis :
▬ Circonstances du décès :
▬ Péché capital principal :
▬ Péché capital secondaire :
▬ Votre rapport à l'alcool :
▬ Votre rapport aux drogues :
▬ Addictions :
▬ Avez vous eu de mauvaises attitudes récurrentes :
▬ Avez vous déjà été victime :


Physique


Petite, Hilde n'était pas très féminine ; avec le temps, ça ne s'est pas vraiment arrangé. Loin de là, même. Sa silhouette tonique, plutôt sportive, témoigne d'années passées à courir régulièrement, à nager et faire des exercices en tout genre : se sentir fatiguée, mal dans sa peau, bonne à rien ou encore incapable est quelque chose qu'elle ne peut supporter. Ses muscles sont fermes, son ventre plat. Elle a de la force dans les bras et dans les jambes sans pour autant tomber dans l'excès inverse : ressembler à un bodybuilder, très peu pour elle. Non, elle aime assez cette saine limite. Mais ce qui la noie d’ambiguïté, ce qui peut faire hésiter les passants ou hausser un sourcil à ceux qui engagent la conversation avec elle, c'est sans conteste son absence nette de courbes féminines. Sa poitrine est plate, petite, passe-partout : à moins de ne mettre des hauts collants ou des décolletés plongeants - chose qu'elle ne fait jamais - on pourrait croire que son torse est tout simplement plat. Sa taille est fine, ses hanches étroites et ses cuisses peu marquées ; elle n'a, en somme, aucune des rondeurs caractéristiques que l'on pourrait s'attendre à observer chez une demoiselle. Ça ne la dérange pas, ne la complexe pas plus que ça. Elle est habituée, s'est appropriée ce que d'autres qualifieraient de défaut. Comme elle se le répète souvent, elle n'a pas choisi d'être androgyne : elle a choisi d'en tirer partie et d'en faire sa particularité. C'est pour cela qu'Hilde garde ses souples cheveux blonds courts, régulièrement en bataille ou repoussés sur le côté suivant les jours. Des mèches un peu ternes retombent sur son front, caressent ses oreilles et le haut de sa nuque. Elle aime cette coiffure, n'a rien contre leur couleur claire et ne les teint en conséquent pas. Quoi qu'ils soient courts, jamais elle ne les néglige : elle fait de son mieux pour bien les agencer, les peigner et les couvrir de soins pour en faire quelque chose qui lui plait.
Blonde aux yeux bleus, véritable nordique à la peau claire et à la voix un peu grave, posée, Hilde juge passer relativement inaperçu. Grande du haut de son mètre soixante-dix-sept, accro aux vêtements dits masculins et aux chaussures basses, il n'est pas rare qu'on la confonde avec un garçon. Elle corrige, tant pis ; ce n'est pas comme si elle n'y était pas habituée. Ses traits sont plutôt fins, pourtant, et ses ongles soignés ; tout comme ses mains, nettement féminines, pourraient donner un indice à quiconque voudrait bien les regarder.
Du reste, Hilde n'est pas très accessoires. Elle porte un bracelet au poignet droit, quelques bagues argentées mixtes quand le cœur lui en dit, et ne quitte jamais la boucle noire accrochée au lobe de son oreille droite - mais c'est bien tout. Pantalons uniquement, jamais de jupes, des chemises ou des polos, pourquoi pas des t-shirt, des vestes ou des manteaux ajustés, pull à capuches, tennis, converses ou baskets... Elle aime être bien habillée mais n'a pas un goût du style très poussé. Résultat, la plupart du temps, elle s'habille comme un garçon standard de son époque. Alors elle n'est pas laide, non, mais elle n'est pas vraiment jolie non plus. "Pas assez mignonne", diraient les garçons, "trop garçon manqué, trop androgyne".
Ça tombe bien, elle ne leur demande pas leur avis.


Caractère


Hilde est une jeune femme volontaire. Elle veut aller de l'avant, gagner et être heureuse : se laisser faire par la vie ? Jamais. Ou jamais plus, du moins. Poings serrés et sourire aux lèvres, elle n'hésite pas à sauter par-dessus les clôtures et courir en riant aux éclats - parce que vivre, ça ne se fait pas à moitié. Alors quand elle est heureuse elle l'est à s'en étouffer de joie, quand elle est triste elle l'est à en mourir et quand elle est en colère, elle l'est à en casser les meubles. La jeune femme ne semble pas connaître le mot "demi-mesures", tant et si bien qu'elle peut vite devenir agaçante. Idéaliste, peut-être, trop impliquée, sûrement, elle prend tout très à cœur. Les insultes la heurtent de plein fouet, les disputes la laissent démunie et les marques d'affection l'emplissent de soulagement et de gêne : elle vit par et pour les sensations. Sans concession. Il y a ceux qui restent toujours de marbre et se construisent un bouclier pour ne pas être blessés, et puis il y a ceux qui font l'inverse. Elle est de ces derniers.
Plutôt simple, pas très intellectuelle, Hilde ne réfléchit que trop rarement avant de parler. Combien de fois lui a-t-on dit "tourne sept fois ta langue dans ta bouche avant de dire n'importe quoi" ? Apparemment, elle n'est pas prête à retenir la leçon. Les mots s'échappent sans qu'elle puisse les retenir, et ce n'est qu'ensuite qu'elle les regrette. Étant une jeune femme plus gentille qu'elle n'est méchante, elle blesse rarement les autres intentionnellement. Pas franchement égoïste ni même opportuniste, elle considère que les mensonges et les manipulations de tous ordres sont trop complexes pour elle. Elle ment de temps en temps, comme tout le monde, essaie de s'en tenir à ce qu'elle pense juste. Elle est toujours prête à tendre une main secourable mais n'est pas naïve pour autant : malheureusement, elle ne se rend pas toujours compte qu'on se sert d'elle.
Ayant tendance à prendre les gens au mot et à foncer sans réfléchir, Hilde a souvent été considérée comme une adolescente un peu stupide, trop insouciante. Ce qu'elle est encore et toujours. Alors chaque fois qu'elle se sent blessée, trahie ou rejetée, elle se recroqueville dans un coin et se prend à détester le monde. Elle est assez extrême dans ses réactions, parfois - et ne se taira, bouche cousue, que si la personne en face d'elle a plus de présence ou d'éloquence. Elle suit volontiers quiconque semble savoir où il va. Parce qu'après tout, elle-même est souvent un peu perdue, déteste être seule. Elle déteste, déteste, déteste être seule.
Du reste, la grande blonde est une personne simple et attachante pourvu qu'on supporte ses remarques parfois peu brillantes et ses excès d'humeur, qu'ils soient dans un sens ou dans un autre. Elle n'en attend pas beaucoup des autres, se satisfait d'un rien et sait pardonner tant que l'on ne l'a pas blessée trop profondément. C'est une battante, peu féminine dans la plupart de ses réactions, qui offre des fleurs aux demoiselles et donne des coups de coudes aux garçons. Elle ne peut rien refuser aux beaux yeux d'une jolie fille ; c'est plus fort qu'elle. Et ça lui joue des tours, croyez-moi. Ça lui en jouera toujours.


Histoire



25 Novembre 2006
Ça n'avait duré que quelques minutes. Pas plus. Les courbes ondulant devant l'écran, les parcelles de peau dénudées laissant peu de place à l'imagination – les caresses, les baisers, les doigts qui glissaient et glissaient et glissaient. Rien n'avait été montré ; tout était resté dans la retenue, le suggéré. Ce n'étaient que de vagues bruits légèrement gênants, un silence caractéristique devant la télévision. Un passage comme on en voit tant dans certains films, passée une certaine heure. De quoi faire glousser ses petits frères comme des dégénérés. De quoi embarrasser ses parents, s'ils avaient été là avec eux.
Mais ils n'étaient pas là.

Cette nuit, c'était soirée films pour la fratrie Madsen. Leur petit moment à eux.
Rien qu'à eux.

Sourde au commentaire déplacé qui fusa de la bouche d'Amleth – ou Rúni , pour ce qu'elle en savait – Hilde avala son pop-corn un peu de travers. A l'écran, la nuit avait tiré sa révérence pour mieux laisser sa place aux rayons matinaux du soleil ; les deux héroïnes, déjà habillées, nouaient leurs cheveux en silence. C'était fini. Il n'y avait plus rien de répréhensible où que ce soit. Plus aucune raison de retenir son souffle comme ça, le cœur noyé d'émotions contraires. C'était fini ; fini. Tout allait bien. Ça n'avait été qu'un passage bizarre dans un film dont ils n'avaient pas exactement prévu qu'il tournerait de cette façon. Ça arrivait.
Ses mains tremblantes étouffèrent derrière une paume moite un soupir étranglé de peur et d'excitation.

« Elles sont quand même suuuuuper belles. » souffla Amleth en hochant la tête.

Et elle de rire, parce qu'elle ne savait plus quoi en penser.
A quatorze ans, pourtant. C'était bête comme tout.

Elle aurait dû comprendre.

Mon Dieu, j'ai chaud.



12 Avril 2001
« Maman ! Maman ! »

La petite main tirait sans relâche sur celle plus épaisse de sa mère, affairée à mettre des bols et des paquets de céréales sur un plateau avec celle que son aînée avait bien voulu lui laisser. Comme bien souvent, cette grande fille de huit ans déjà était levée : en même temps que papa et maman, s'il vous plaît. Elle n'appréciait guère les siestes ou les levers tardifs, adepte qu'elle était de l'expression « le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt ». La personne qui la lui avait apprise ne pouvait pas savoir qu'elle l'appliquerait à la lettre pour les années à suivre et toutes les suivantes encore. Grave erreur d'éducation de leur part. Même plus le temps de se reposer le matin.
La jeune femme, tout en passant des doigts aux ongles coupés très courts dans ses cheveux blonds terne, poussa un soupir ennuyé. Elle n'était pas du genre maternelle. Il fallait bien comprendre – et ce n'était pas tant difficile ; elle le répétait souvent – que l'idée d'avoir des enfants était venue de son mari, et non d'elle. Si ça n'avait tenu qu'à sa propre personne, ils seraient restés seuls avec, peut-être, un chien et quelques chats, sinon plutôt des poissons rouges. Ça, ç'aurait été la vie parfaite. Personne pour les ennuyer, rien pour les forcer à instaurer une routine ennuyeuse, pas de petites choses blondes aux grands yeux bleus toujours prêtes à vous rabâcher que « j'ai faim », « j'ai soif », « j'ai chaud », « j'ai vomi » et que savait-elle encore.
Oh, il ne fallait pas croire. Elle aimait ses maintenant trois bouts de choux. Seulement voilà ; parfois, comme en ce moment, elle était prise de l’irrésistible envie d'envoyer toute cette belle ribambelle d'enquiquineurs dans un caniveau bien profond au fin fond de la Russie.

« QUOI. »

Pas plus décontenancée que ça par l'attitude hargneuse de sa génitrice, à laquelle finalement la petite était habituée, elle croisa les bras et darda sur elle un regard inquisiteur.

« Je peux aller réveiller mamie ? Diiiiiiiis.

-Oh, si c'est que ça – va la réveiller, la vieille bique. Hésite pas le petit croche-pied en passant. »

L'enfant ouvrit de grands yeux et, avant de partir, s'exclama un « je vais le dire à papa » que sa mère eut tôt fait d'étouffer à grand renfort de menaces concernant son plat du soir. Elle avait pris l'habitude de faire comprendre à ces petits garnements désobéissants que s'ils ne faisaient pas les choses comme il fallait, ils n'auraient rien à manger ; et ce n'était pas leur père, à peine capable de réchauffer un plat tout prêt au micro-onde, qui risquait de les sauver. Ils seraient donc le cas échéant coincés avec leur ventre vide et leurs jolis yeux pour pleurer leurs actes malveillants. Rien de plus. Bien sûr Hilde n'y avait pas cru, au début, en bonne aînée despote et prête à tout pour une demi-heure de jeux en plus : seulement quand la menace avait été mise à exécution, ça avait tout de suite beaucoup moins rigolé.
Enfin, au début, si. Elle avait commencé par installer une chaise devant le placard pour voler les bonbons – s'était fait prendre, bien sûr – et avait donc eu l'occasion de voir que sa mère, prête à aller jusqu'au bout de sa punition, n'hésiterait pas en cas de rébellion à enfermer une nouvelle fois toutes les chaises de la maison dans le garage pour l'empêcher de se nourrir à sa faim.

Ça forçait quand même un peu le respect.

La petite blonde, dont les pas résonnaient quatre à quatre dans l'escalier principal de leur humble demeure, portait une grande admiration à sa mère. Son père était un peu plus gentil quoi que tout aussi ferme, mais curieusement elle ne lui vouait pas les mêmes sentiments ; elle voulait ressembler à maman, pas à papa. Voilà tout. Ce n'était pas un gros problème dans le sens où son affection restait également partagée entre les deux adultes, qui s'occupaient d'elle aussi bien qu'elle l'aurait désiré. Bien entendu, parfois, il y avait des ratés. Des gifles manquées. D'autres qu'elle n'avait pas vraiment méritées. Des disputes avec ses petits frères de six et cinq ans, aussi. Tout n'était pas rose, rien n'était tout à fait gris ; le monde était beau et les fleurs du Danemark poussaient avec la fierté de drapeaux autrefois accrochés aux fenêtres des étages.

« Maaaaaamie ! »

L'enfant poussa la porte et plissa immédiatement le nez. Il régnait dans la pièce – la pièce de grand-mère, comme elle et ses frères le disaient si bien – une odeur assez répugnante de médicaments mêlée à celui d'un parfum trop peu coûteux pour sentir réellement bon. Il avait le mérite de cacher certaines odeurs mais d'autres, plus résistantes, subsistaient ; la petite posa sa main contre son nez et, vaillante, avança jusqu'au lit où se reposait la veille dame.
Sa main, aux doigts déjà longs et fins, vint se poser sur celle vieille et ridée qui attendait contre les draps blancs.
On l'aurait crue morte, ainsi allongée.
Hilde réprima un frisson exagéré.

« Maaaamie. On va prendre le petit-déjeuner. »

Doucement, elle secoua le bras de sa grand-mère. Celle-ci entrouvrit ses yeux et, dans un souffle, inspira une goulée d'air frais. Ç’aurait pu être une momie revenant à la vie que ça n'en aurait pas paru moins effrayant aux yeux de la fillette ; elle aimait sa mamie, pourtant. Ce n'était juste pas simple de la voir en si mauvais état. Elle avait un petit cœur fragile au creux de la poitrine.

Du moins parait-il.

« Ton père est un homme bien. »

Lèvres pincées, yeux plissés, l'enfant regarda avec circonspection la main que l'on avait refermée sur la sienne. Elle sentait mauvais. Pas mauvais mauvais, mais cette odeur piquante et un peu amère qui ne la quittait guère la rendait malade.

« Ta mère aussi. »

Uh. Bon, elle passa sous silence l'épisode du croche-pied, consciente que ça n'apporterait rien de bien à personne ; ce n'était pas l'effronterie qui lui manquait, mais un peu d'empathie bloquait ses paroles acerbes. Pas la peine d'empirer les choses. Sa grand-mère savait parfaitement toute l'affection que sa belle-fille lui portait depuis que son cher époux, toujours prêt à aider son prochain, l'avait ramené à la maison pour qu'elle y finisse ses vieux jours. Tous savaient qu'elle n'en avait plus pour longtemps et personne, les enfants y compris – dans une moindre mesure, n'osaient trop l'embêter ou lui signaler qu'elle gênait. Ils se doutaient qu'elle savait, mais tout le monde gardait le silence. Le seul grand moment de détresse qu'avait connu Hilde à l'annonce de l'arrivée de sa mamie avait été la perte de sa chambre au profit de la vieille dame. Devoir dormir avec ses frères ne l'avait guère enchantée au début.

Maintenant, elle peinait à s'imaginer vivre ailleurs.

« Oui, mais on mange. Allez. Debout, mamie. »

Lentement, avec des gestes précis quoi qu'un peu tremblants, la dame se redressa pour mieux se hisser, avec l'aide de sa petite fille, sur le plancher. Elle refusait de se déplacer en fauteuil roulant mais disposait d'un déambulateur ; monter et descendre les marches n'était pas simple pour elle, mais n'ayant aucune chambre au rez-de-chaussée... Ils n'avaient pas vraiment eu le choix.

« Dis grand-mère, tu pourras me re-raconter quand tu étais jeune ? »

Les larmes de la vieille dame n'éveillèrent en rien le sentiment d'avoir fait une bêtise dans l'esprit de la petite blonde. Déjà concentrée sur la descente des escaliers, elle s'accrochait à elle sans chercher à voir son visage.

« Oui... Si tu veux, oui.

-Cool ! »

Son joli sourire illumina la salle à manger lorsqu'elles réussirent enfin à y parvenir, aidées à mi-chemin par le père de l'une et fils de l'autre. Il n'y avait, dans son regard, aucune malice ni aucune méchanceté ; elle aidait parce qu'elle en avait envie, comme lorsqu'elle grimpait spontanément sur le tabouret pour essuyer la vaisselle que sa mère nettoyait.
Une main sur l'épaule de sa grand-mère, elle éclata d'un rire contagieux.

« J'espère que j'aurai une aussi gentille petite fille que moi, hein ! Je suis génialement cool ! »

Sa mère, exaspérée, lui donna une tape à l'arrière de la tête.

« Faudrait déjà que t'ai un gosse pour ça, mon chat. Fais les choses dans l'ordre.

-Mais ! J'en aurai ! Dix, même ! Pourquoi j'en aurai pas ? »

Sa mère haussa les épaules, l'air désintéressée.

Oui, hein, pourquoi ?
Tout le monde en a, tout le monde est pareil, tout le monde est joli.

N'est-ce pas ?



03 Mai 2003
« Laaance, Hilde !

-Ouais, ouais, deux secondes ! »

Accroupie dans la coure de l'école, avant-bras posés sur ses genoux nus, la petite fille ferma un œil pour mieux évaluer la situation. Elle était suffisamment loin de l'autre pour que toute décision hâtive puisse lui coûter la vie ; ou, en l'occurrence, sa jolie bille bleue. N'étant cependant pas une femme de réflexion mais plutôt d'action, elle occulta bien vite cet aspect du jeu. Elle n'était pas du genre à se la jouer intellectuel avec des plans plein la tête et des idées en veux-tu en voilà. Non, pas du tout. Elle, ce qui la bottait, c'était tacler la bille des autres avec la force et le courage d'un lion.
Il fallait dire qu'avec ses longs cheveux blonds emmêlés dans lesquels s'était sûrement perdu un énième élastique, elle ressemblait plus ou moins à l'animal en question.

La bille, dans un léger bruit de roulement, fut lancée sur le sol irrégulier ; elle y virevolta jusqu'à ce que, dans un concert de cris outrés et joyeux, elle ne vienne heurter celle de son ami.

« HAHA, je t'ai battuuuuuu ~

-C'est pas juste ! Revanche, revanche ! »

Hilde, dos redressé, posa victorieusement ses deux mains sur ses hanches. En tant que vainqueur, elle avait bien sûr le droit de vie et de mort sur le perdant ; ou, en l'occurrence, la chance de décider si elle allait retenter le coup et mettre ses gains en péril ou plus simplement se retirer avec fierté et élégance.
Bien entendu, le choix était vite fait. Son poing glorieux fendit l'air devant elle avec la force de mille soldats.

« Tu peux crever, bâtard !

-Her ! D'où tu fuis, saleté de fille ! »

Nikolaus avait été trop loin. Légèrement. L'intention était là et il savait ce qu'il faisait – raison pour laquelle, lorsque son amie poussa un rugissement guerrier avant de s'élancer à sa poursuite, il avait déjà empoché les billes et s'était enfui en courant.
Malheureusement pour monsieur, les jambes de la demoiselle étaient aussi longues que fermes ; elle faisait du foot et du baseball à ses heures perdues et, ce n'était un secret pour personne, devait être la plus sportive des filles de sa classe. Voire, en fait, de l'école. Elle égalait les garçons sur bien des points et n'hésitait pas à relever les défis qu'on lui lançait régulièrement pour vérifier qu'entre temps elle ne s'était pas ramollie : à cet âge-là, la scission bien nette entre filles et garçons qu'elle cassait allègrement laissait tout le monde un peu songeur. C'était comme voir un petit garçon jouer à la poupée. On se moquait, on se demandait. On ne comprenait pas.
« Mais c'est un truc de fille, t'es trop bizarre ! »

C'était moins marqué dans l'autre sens, mais tout de même. Hilde essuyait quotidiennement des remarques de ses camarades féminines concernant son manque de tact et de douceur.

Pas que ça la gêne ; pas que ça l'empêche d'avoir des amies filles non plus.

« EXCUSE TOOOOI.

-Jamais ! Plutôt mourir ! »

Assise sur le dos de Niko, dont elle tenait les bras fermement coincés derrière son dos, contre sa colonne vertébrale, la petite fille étira ses lèvres sur un large sourire ; puis, d'un geste habitué, lâcha tout pour se mettre à lui tirer la joue.

« Excuse toi excuse toi excuse toooooi ~

-ARRÊTE CA ! HER ! »

Dans un beau mélange de cris et d'exclamations toutes plus vives les unes que les autres, l'enfant parvint à reprendre l'avantage sur son bourreau. L'instant d'après, c'était lui qui se tenait à califourchon sur son amie, dos au sol et les cheveux emmêlés dans la poussière : ça ne l'empêcha pas de recommencer à lui tirer les joues mais au moins, maintenant, il pouvait faire de même.

« Bhhhhhhh –

-Grrhhhhh. »

Quelle éloquence, aurait dit la maîtresse.
Mais quelle chance, quelle chance...

Épuisés, les deux enfants roulèrent au sol l'un à côté de l'autre.

« Dis, Hilde. »

Quelle chance d'être là ensemble, toi et moi.

« Hm ?

-On se mariera, quand on sera plus grands, hein ? »

Deux grands yeux bleus cherchèrent ceux d'un mordoré à se damner du joli brun.

« Bien sûr ! »

Quelle chance, quelle chance.



25 Juillet 2009
Hela hela hela hela la...

« Hilde ! Nikolaus ! Vous venez ? Ça va être froid ! »

Ha ~

« Oui oui, on arrive ! »

Tandis que tout le monde s'était réuni autour de la table extérieure pour manger, les deux adolescents étaient encore dans la cuisine. Hilde lavait ses mains déjà propres avec l'application d'une servante tentant de se repentir de ses fautes en se faisant le plus mal possible ; son ami, bras croisés près d'elle, la regardait faire sans rien dire. Peut-être n'osait-il pas. Peut-être n'y voyait-il pas d'intérêt. Peut-être s'en fichait-il, tout simplement.

En vérité, il connaissait trop bien la demoiselle pour voir l'utilité d'une telle manœuvre. Elle faisait toujours ce qu'elle voulait. Ce n'était pas lui conseiller de se calmer ou d'exploser une bonne fois pour toute qui allait y changer quoi que ce soit.

« Hilde. »

Entre ses dents serrées, elle marmonna un « lâche moi » auquel il ne comprit absolument rien ; doucement, sa main vint enserrer son épaule entre ses doigts immenses.

« Quand j'ai dit que ça pouvait pas durer. Tu sais bien que je mentais, hein ? »

Indifférente à son discours, elle persista à se laver les mains.

« Je resterai tant que t'as besoin de moi. »

Un sanglot étouffé, enfin, réussit à se glisser hors de sa gorge nouée. Tandis qu'il coupait l'eau d'une main, il fit glisser la silhouette élancée de son amie contre la sienne de l'autre ; la serra contre lui et, les yeux à demi-clos, se jura de ne jamais la lâcher.
Voilà qu'elle pleurait.

« Alors, les amoureux, vous venez ? »

L'exclamation de son père tira une nouvelle salve de sanglots à Hilde.
Amoureux de rien du tout, papa.

Ça faisait tellement mal au cœur.



03 Décembre 2007
Comment savoir si on est...

Soupir. Jambes croisées sous son bureau, menton reposé contre la paume de sa main, la jeune fille ferma son ordinateur portable dans un « clap » sonore. C'était stupide. Tout ça était stupide. Ça allait faire des mois et des mois qu'elle se posait la question – la question interdite – et jusque là jamais elle n'avait été capable de l'inscrire jusqu'au bout dans sa barre de recherche. Ça l'ennuyait. Elle ne savait pas. Ne comprenait pas. N'arrivait pas à définir si oui ou non ce n'était qu'une phase, et si oui ou non elle avait bien compris ce qui se passait dans sa petite tête blonde ; rien n'était moins sûr et au fond, quoi de plus normal. C'était compliqué, tout ça. Beaucoup, beaucoup trop compliqué pour une fille aussi simple et impulsive qu'elle. Elle ne voulait rien avoir à faire avec ces histoires.
Et pourtant.
D'un geste impulsif,  Hilde rouvrit l'ordinateur et entra le mot de passe de sa session. Elle ne pouvait pas mourir sans savoir. Ça la troublait ; lui remuait l'estomac et tout ce qui s'en approchait d'un peu trop près, comme un ouragan ou un typhon violent. Elle voulait savoir. Devait savoir. Avait besoin de savoir.

Les touches tapèrent sans qu'elle ait besoin de les regarder.

Allez. Cette fois, c'est pour de vrai.



12 Décembre 2007
« Hilde ! »

Assise sur un muret, les pieds se balançant dans le vide, Hilde leva la tête vers le ciel plutôt que son ami. Elle regarda les nuages d'où tombaient de jolis flocons de neige ; ferma les yeux, les rouvrit. Le froid mordait ses doigts nus en plaques rouges sur peau pâle, y créant d'élégantes marbrures. Ce n'était pas un jour à mettre un chien dehors. Ce n'était un jour à mettre personne dehors, en vérité – et il allait sûrement faire encore plus froid les semaines suivantes, et encore plus les mois qui suivraient. Ce n'était pas un hiver très favorable aux jeux en t-shirts et sans écharpe. La jeune fille, pourtant, s'était habillée plus que sommairement. D'une part parce qu'elle n'avait pas pensé qu'il ferait froid en sortant ce matin-là, d'autre part parce qu'elle avait l'espoir secret que, peut-être, ça lui remettrait les idées en place. De se transformer en petit glaçon. Un tout petit glaçon.
Enfin son cœur, du moins.

Même si, internet aidant, il semblait que ce soit son cerveau qui soit en cause.

Elle n'y comprenait décidément rien.

« Hiiiiilde ~ Chérie d'amour, je te parle. »

D'un coup de pied presque réflexe, la jeune fille frôla dangereusement l'épaule de Nikolaus. Peu surpris et encore moins inquiet, le garçon se mordilla la lèvre inférieure – un vieux tic qu'il n'arrivait pas à perdre – et lui tendit une main pour soit l'aider à descendre, soit qu'elle l'aide à monter.
Après une seconde d'hésitation, elle tira sur son bras pour le faire grimper à ses côtés.
Il savait bien ce que ça voulait dire.

« Un truc sur le cœur ? »

D'un geste fort élégant, mademoiselle cracha le chewing-gum qu'elle s'appliquait à mâchonner dans l'herbe fraîchement recouverte de poudreuse. Niko, soucieux de bien faire, épousseta celle qui était tombée sur les épaules de son amie ; il ne broncha même pas quand, visiblement en colère, elle l’attrapa par les siennes.
En un quart de secondes, avec plus de violence qu'il n'était nécessaire d'en mettre dans ce genre de geste, elle réduisit l'écart séparant leurs lèvres à zéro.

Il y eut comme un moment de flottement où ni l'un ni l'autre ne sut que faire ; puis, comme résigné, le garçon passa un bras autour du cou de son amie pour l'attirer plus près de lui.

Elle qui n'avait jamais embrassé personne se trouva maladroite et gênée, trop vite à court de souffle ; Nikolaus, lui, semblait aussi calme et tranquille que s'il avait fait ça toute sa vie. Ça lui semblait plus naturel d'un côté que de l'autre. Plus facile d'un côté que de l'autre.
Si elle le sut, ce fut parce qu'elle rouvrit les yeux.
Et personne ne fait ça, pas vrai ?

Sans méchanceté mais avec suffisamment de brusquerie pour sembler autoritaire, le jeune homme écarta son visage de celui, rougi par la honte, de sa meilleure amie.

« T'essayais de te prouver quoi, là ? »

Elle avait les larmes aux yeux, Hilde. Et s'il y avait quelque chose d'offusquant dans le fait qu'elle s'essuie doucement la bouche de sa manche droite, l'air profondément perdue, ce simple détail – elle allait pleurer – ôta tout sentiment de colère du cœur de Nikolaus. Il pensait avant tout au bien être de la demoiselle. Sa petite grande blonde.
Et elle, elle...

« Je veux... Me marier avec toi. »

Et ça y est, la voilà qui pleurait. A califourchon sur le muret, le garçon la prit dans ses bras et caressa doucement ses cheveux de ses doigts de pianiste. Il n'y avait rien qu'elle préfèrait à ses mains ; elles étaient douces, grandes, rassurantes. Depuis qu'elle le connaissait, il n'y avait jamais eu personne qui réussisse à le surpasser à ses yeux et dans son cœur. C'était son meilleur ami, son frère de cœur, son âme-sœur. Elle ne voulait de personne d'autre pour prendre sa place. Il était parfait comme il était, avec ses dents de devant trop longues et sa peau abîmée par l'adolescence ; avec ses jolis cheveux bruns et ses yeux d'un mordoré si prenant qu'elle aurait aimé se noyer dedans.
Elle ne s'était jamais posé la question, jusque là. Celle de savoir si oui ou non, en fait –

« T'es pas amoureuse de moi, Hilde. »

Les larmes redoublèrent en intensité.

« Si !

-Non. Mais je m'en fiche, tu sais. On a pas besoin de se marier pour pas se quitter. Hein ? »

Accrochée à lui comme si sa vie en avait dépendu, elle tenta d'oublier les réponses d'internet et tout ce que ses parents avaient pu dire à ce sujet les rares fois où il avait été abordé.
Qu'il puisse penser pareil, lui aussi, lui faisait peur.

Monstre, aberration, dégoûtante.

« Tu me détesterais.

-Non.

-Si. »

Et les larmes qui n'arrêtaient pas.
Oh mon Dieu, comme j'aimerais qu'il pleuve.

Effacez ça.



Allongée sur son lit, tête bêche avec son ami, la demoiselle leva le magazine qu'il lui avait prêté le plus haut possible du bout de ses deux bras.

« Alors ? Ça te fait de l'effet ? »

Elle le tourna ; le retourna. Plissa les yeux pour mieux voir la série de demoiselles en sous-vêtements qui posaient sur chaque page, en quête d'une qui attirerait plus son attention que les autres. Finalement, à force de tourner les pages comme s'il s'était agi d'un simple livre de cuisine dont le but était vraisemblablement de la faire saliver ou non, une silhouette finit par capter son regard.
Plutôt menue quoi que certainement dans sa vingtaine, la jeune fille avait de longs cheveux bruns retenus en queue de cheval haute et un visage de poupée à en faire rêver les plus pieux des hommes. Sa lingerie, ni vulgaire ni trop suggestive, semblait posée sur elle le plus naturellement du monde ; comme si elle avait été là, à regarder la fenêtre et non à poser pour un magazine louche. Elle semblait étonnamment peu à sa place comparée aux autres.

Du moins était-ce l'impression qu'elle eut en la voyant là, près d'une blonde à la poitrine bien trop grosse pour être vraie ou attrayante.

« Hm ? »

A la fixer comme ça, en plus de se sentir terriblement sale, Hilde eut l'impression de revenir des mois en arrière ; quand, devant ce film dont plus personne sauf elle ne se souvenait, elle avait ressenti cette drôle de sensation au creux de l'estomac.

Chaud.

« Euh... Ouais, je crois. »

Apparemment tout excité par la nouvelle qu'il venait d'apprendre – et avait étonnamment bien pris, sachant qu'elle venait tout de même de sa censément future femme, Niko se retourna sur le ventre et s'empara du livre. Peu désireuse de le garder entre ses mains de toute façon, la demoiselle le laissa faire avec une joie non dissimulée. Elle n'était pas à l'aise avec cette histoire. Que quelqu'un d'autre sache qu'il était possiblement éventuel que tout compte fait elle préfère les filles aux garçons l'avait, au final, rassurée : c'était un pas de plus vers l'acceptation et la belle vie, comme l'aurait dit certains. Seulement non. C'était aussi terriblement effrayant. Elle avait beau avoir une confiance totale et aveugle en son ami, l'idée qu'il puisse laisser filtrer quelque chose devant ses parents était plus terrifiant que tout ce qu'elle avait jamais pu imaginer jusque là.
Papa et maman ne vivaient pas au vingt-et-unième siècle à ce sujet-là. Oh que non.
Dégoûtant, dégoûtant.

« Donc t'aimes les petites brunes mignonnes. T'as bon goût.

-Her ! Rigole pas avec ça ! Je suis pas...

-Si, t'es sûre. Sinon tu t'en serais pas rendue malade pendant des mois. »

Sa réponse, accompagnée d'une pichenette sur son nez droit, tira une grimace embarrassée à la jeune fille. Elle s'en voulait de ne pas lui en avoir parlé plus tôt ; c'était quand même son prince charmant, après tout. Sûrement le seul homme qui compterait jamais, avec son père et ses frères. Il fallait s'y résoudre. A un moment donné, elle n'aurait plus tellement le choix.

« Dis, j'ai un service à te demander.

-Oui ? »

Le cœur serré, Hilde s'assit ; attendit que son ami face de même et, solennellement, s'empara de ses deux mains. Elle peinait à les tenir entre les siennes, plus petites et plus féminines, mais ne s'en préoccupa guère.

« En attendant que je réussisse à résoudre tout ça, tu veux bien faire semblant d'être mon petit-ami ? »

Surpris, il cligna des yeux.

« … Comme tu veux, maiiis...

-Si tu es amoureux de quelqu'un d'autre on arrête, promis. Juste le temps que ça s'arrange. Pour mes parents. »

La pression qu'elle exerçait sur ses mains, les tremblements qui les agitaient, tout criait la peur. Elle était terrifiée, malgré son sourire qui se voulait assuré, rassurant.
Ils n'étaient rien que des gamins, hein ?

« Okay. Mais en contrepartie, je veux avoir le droit de te tou –

-T'es malade ! »

L'oreiller qui vola  jusqu'au visage du garçon fut accompagné d'un million de rires volages.

Et ça ira, ira ira ira ra ~

Haaaa.



03 Octobre 2010
« Je t'aaaaaaime. »

Sur le lit, dans les draps, entre ses bras. Je t'aime je t'aime je t'aime.

« Moi aussi je t'aaaaaime. »

Le petit rire de la brune lui noua la gorge de bonheur. Elle était là. Là, là, là.
Elle s'était réveillée avec elle à ses côtés. Elle ne s'était pas envolée pendant la nuit. Personne ne la lui avait volée. Elle n'était pas partie.

Mon Dieu, elle n'était pas partie.



18 Août 2009
On a rompu.

Allongée dans son lit, le bras tendu vers le mur, Hilde ouvrit et referma son poing sans réussir à attraper quoi que ce soit. Sa peluche de renard serrée contre son cœur, elle étouffa une plainte dans sa fourrure rousse. Ce n'était même pas son vrai petit-ami. C'avait pourtant été difficile à annoncer à ses parents. Ils étaient déçus, forcément. Ils s'étaient déjà imaginé les petits-enfants, le mariage... Alors c'était désolant pour eux. Évidemment. Mais elle ne voulait pas bousiller des années de réelle amitié pour quelque chose qui n'avait de sens que pour elle ; ne tenait pas à empêcher Nikola de vivre sa vie, non plus. Dans un sens, c'était sûrement mieux comme ça. D'accord, tout le monde était triste pour elle. Sans raisons. Et d'accord, elle se sentait mal de sentir ces regards peinés posés sur son dos dès qu'elle passait le pas de la porte mais – mince, ce n'était pas son petit-ami !

Énervée, angoissée, elle jeta de toute ses forces le renard contre la fenêtre.

Elle l'aimait comme un frère. Pas la peine de se faire de belles illusions. Se mettre nue devant lui ne l'aurait pas plus gênée que lorsqu'elle se promenait en tenue d'Eve sur la plage étant enfant. Ce n'était qu'un garçon. Son garçon. Le sien. Et il était parti.
Elle le reverrait, bien sûr. Mais elle avait l'impression d'avoir trop attendu de lui, de lui en avoir trop demandé ces dernières années. Il semblait légèrement plus distant et elle, ça la tuait de l'intérieur. C'était son meilleur ami. Comment était-elle censée faire, sans lui ?

Une larme solitaire roula le long de son oreiller.

« Hilde... ? »

La jeune fille, doucement, essuya ses yeux rougis. La sensation de quelqu'un s'asseyant près d'elle sur le lit la fit légèrement glisser sur le côté ; pas la peine d'être un génie pour savoir que c'était Amleth qui venait de s'installer près d'elle. Si ç'avait été Rúni, elle ne l'aurait pas même senti arriver. Il était maigre comme un clou là où son aîné, par les aléas de la génétique, s'était retrouvé enveloppé. Comme son père. Comme sa mère.
Comme plus de la moitié de la famille, au final. C'était sa petite blague à lui ; son truc pour être sûr qu'il n'avait pas été adopté, contrairement aux deux autres baguettes de service. Ça ne le faisait rire qu'à moitié – jaloux –  mais il faisait avec. On a pas tout ce qu'on veut.
Une main aux doigts épais vint caresser ses cheveux.

« Ça va pas ?

-Si. Retourne te coucher. »

L'idée de lui demander comment il pouvait savoir que ça n'allait pas lui traversa l'esprit ; seulement la porte de sa chambre était ouverte et pour aller en bas, il fallait forcément passer devant. Il l'avait probablement vue jeter son pauvre renard. Ou l'avait entendue renifler. En clair, les possibilités ne manquaient pas et importaient réellement peu.
Il était là, au moins. Et là tout de suite, elle avait vraiment besoin de ne pas être laissée toute seule.

« Ça va aller, tu sais. Vous êtes toujours amis, non ? »

Son cœur la lançait comme une blessure au doigt après avoir trop joué aux imbéciles avec un couteau. Ça faisait mal. C'était horrible. Tromper tout le monde, devoir sans arrêt jouer la comédie. Elle en avait marre. Elle voulait vivre, elle aussi. Avoir une petite-amie. Être heureuse. Réussir ses études. Ce n'était pas trop demander, si ? Hein ? Ce n'était que le basique, ce que chacun pouvait attendre de la vie sans trop risquer de se tromper – le minimum requis pour vivre convenablement, en quelque sorte. Elle ne pouvait pas rester cachée éternellement. Ses parents finiraient par savoir. Tout le monde finirait par savoir. C'était comme ça. Les secrets n'étaient pas faits pour être emportés dans les tombes, encore moins pour ne pas être partagés. Nikolaus était au courant. Nikolaus était parti.
Il était temps de passer le relais à quelqu'un d'autre.

« Dis, je... »



28 Septembre 2009
« Alleeeeeeeez Hilde !

-Non !

-Allez !

-Non je te dis ! »

Enroulée dans ses couettes, la jeune fille fit « non » de la tête. Adeline, loin de se décourager, tira sur les jambes de son amie pour tenter de la faire bouger ; loin d'être aussi grande et sportive que cette dernière, cette tentative fut cela dit soldée par un échec cuisant. Impossible de la bouger par la force. Restait donc à la convaincre de se déplacer d'elle-même : ce qui, vu comme c'était parti, relèverait du miracle ou de l'intervention divine.
Quand Hilde disait non, c'était non.

« Donne moi une seule bonne raison pour ne pas sortir faire la fête. UV bubble party, femme ! Ça se refuse pas ! »

Une seconde de blanc flotta dans l'air.

« Je suis lesbienne. »

Dans un râle équivalent à celui d'un ours mourant, la jeune fille posa exagérément sa main contre son visage levé vers le plafond. C'était l'excuse du siècle, depuis qu'elle avait rencontré sa toute nouvelle colocataire ; elles étudiaient toutes deux dans la restauration et dès le début, ça avait accroché entre elles. Cependant...
Si elle lui sortait « j'aime les filles », « je suis une aberration » ou « j'ai mes règles » chaque fois qu'elle lui proposait de sortir, ça n'allait définitivement pas le faire. Elle était du genre à aimer faire la fête ; l'autre, à tout faire pour respecter la loi en ne sortant pas avant ses dix-huit ans. Ce n'était pas qu'elle était rabat-joie, la grande blondinette, mais pas loin quand même. A croire qu'être gay lui avait ramolli la partie du cerveau qui gérait la joie. Tout ce qu'elle avait pu vivre jusque là, ce qui avait fait d'elle ce qu'elle était elle et ce qui pouvait la gêner dans le fait de préférer les filles – tout ça, Adeline n'en avait cure. Tout ce qui comptait était de l'entraîner avec elle pour lui faire sortir de la tête l'idée de passer sa vie allongée sur le canapé ou dans son lit quand elle ne traînait pas en salle de cours.
Ce n'était définitivement pas une vie.

« ON. S'EN. FOUT. Ma fille, on est en 2009 ! Bientôt on pourra se marier comme on veut partout dans le monde ! »

Elle ne croyait pas si bien dire.

« Maiiiiiis mes parents.

-Vivent à l'âge de pierre et sauront pas que t'es sortie. Allez, sois une femme, mets tes bottines et bouge tes fesses ! T'es plus une gamine, faut faire tes propres choix ! »

Elle eut beau marmonner un « alors je choisis de dormir » qui n'avait de convainquant que le nom – et encore – ce ne fut pas suffisant pour faire lâcher prise à la petite blonde. Elle n'était pas prête à partir sans elle.
Finalement, quoi que récalcitrante, Hilde finit par sortir de son cocon improvisé et se redressa sur ses deux pieds.

« Pas longtemps, alors » grommela-t-elle.

Loin de prêter attention à ses élucubrations sans importance, Adeline s'empressa de sortir des vêtements de l'armoire et de les jeter sur sa colocataire. Avant même qu'elle ait eu le temps de protester, elle se retrouva déshabillée et rhabillée ; poussée dehors et, en deux temps trois mouvements, attrapée par le bras direction les rues de Copenhague.
Le vent froid claqua contre ses bras nus. La tête en l'air, elle regarda en direction des nuages.

Hela hela hela hela la...



Ha ~



Je vais pleurer demain.



… Tant pis.



Assise dans la douche, Hilde poussa un profond soupir.

L'eau coulait sur ses épaules, sa poitrine, son ventre. C'était chaud. Réconfortant.

Doucement, elle ramena ses jambes contre elle et les enlaça de ses bras. Visage caché dans son fort improvisé, elle retint ses larmes.

Ce qu'elle pouvait avoir froid.



01 Janvier 2010
Enveloppée dans un épais manteau noir, Hilde s'empressa de traverser la rue. Le bruit des voitures et des conversations passantes emplissait ses oreilles d'un désagréable brouhaha discontinu ; une paire de cache-oreilles sur la tête, elle se contenta de presser le pas. Il faisait froid, ce jour-là. Comme la veille, comme le lendemain. Comme chaque hiver. Ça n'avait rien de spécial. Rien n'avait quoi que ce soit de différent. Menton redressé vers la masse de nuage menaçant à tout moment d'ensevelir la capitale sous une épaisse masse de neige immaculée, elle poussa un soupir verglacé sur lequel ses pensées faillirent bien trébucher. Elle n'allait pas mal. N'allait pas bien. Ne voyait d'utilité qu'à peu de choses et s'en amusait pourtant. Sa vie n'était rien d'autre qu'une longue suite d'incohérences trop complexes ou bien cachées pour qu'elle cherche même à les débusquer ; une route goudronnée couverte de cailloux et de morceaux de soleil.
Parfois, elle les ramassait.
Parfois, elle les écrasait.

Mains gantées ramenées devant son visage pour le réchauffer, appuyée au mur d'un petit bar de quartier, la jeune fille tenta de faire le point. Elle avait l'argent que ses parents lui envoyaient. Ses cours se passaient plutôt bien, pour l'instant. Ses amis étaient toujours aussi présent. Nikolaus un peu moins. Ses frères lui envoyaient des messages quotidiennement, quand ils ne l’appelaient pas tout simplement pour avoir de ses nouvelles.

Elle n'avait pas de quoi se plaindre, en définitive, et c'était bien ça le problème.
Il lui semblait que si sa vie s'était subitement écroulée sur elle-même, elle aurait au moins eu une raison valable de se sentir si seule et mal aimée. Ç’aurait toujours été mieux qu'un caprice stupide d'enfant gâté.

« Vous ne rentrez pas ? »

Surprise, Hilde sursauta. La petite silhouette menue d'une jeune fille de peut-être son âge – à peine plus âgée ? – venait de passer  par l'encadrure de la porte. Gênée, elle se mordilla l'intérieur des joues. Ce n'était pas qu'elle ne voulait pas rentrer. Plutôt qu'elle n'osait pas. Ça allait faire des jours qu'elle venait jusqu'à ce bar spécifiquement pour aller y boire un verre, même d'eau ; mais non, rien. Encore un truc qu'elle était incapable de faire, tout ça parce qu'elle manquait cruellement d'assurance à ce niveau.
Son haussement d'épaules ne sembla pas convaincre la demoiselle, qui sortit tout à fait.

« Vous devriez, vous allez prendre froid. On est bien à l'intérieur ! »

D'un geste extrêmement élégant malgré le froid qui devait saisir ses bras presque nus, l'inconnue lui tendit la main.

« Alleeeez. »

Alleeeeez Hilde. On s'amusera bien, tu verras !
Hilde, viens je te dis !
Allez, fais pas ta chochotte !
Tu viens, oui ou non ?


« Euh, c'est que...

-C'est gay friendly, pas gay tout court. Si c'est ça qui vous dérange.

-Non non ! Euh, je voulais pas, enfin, vous... »

Un rire clair s'échappa dans l'air. Surprise, hébétée, Hilde regarda ce petit bout de jeune femme saisir sa main gantée pour la traîner à l'intérieur.
Bam bam bam.

Tais toi, mon cœur.



18 Septembre 2012
« Hilde ! »

La grande blonde se retourna sans un mot, les yeux grands ouverts ; étonnée, ça oui, pire qu'étonnée même – c'était presque comme s'il y avait écrit « qu'est-ce que tu fous là ? » en lettres capitales sur son visage aux traits tirés. Yeux rivés sur cette silhouette frêle aux cheveux emmêlés par le vent, Hilde ne pensa même pas à partir sur la droite ou sur la gauche. Elle resta là, un sac sur l'épaule, l'autre à ses pieds, plantée devant la ligne jaune du quai de la gare.
Ses poings se crispèrent. Je veux pas te voir, je veux pas te voir.
Tout ce qu'elle voulait c'était partir de cette foutue ville, se tirer en courant, la queue entre les jambes, comme la pire des lâches ou la plus timorée des aventurières. Elle voulait s'en aller, prendre le prochain train sans regarder en arrière. Elle n'avait aucune envie de regarder en arrière. C'était bien pour ça qu'elle avait fait ses bagages sans prévenir personne, qu'elle s'était inscrite pour une formation loin, très loin d'ici : pour fuir ses problèmes.
Elle n'avait pas le choix. Elle voulait partir.

« Qu'est-ce que tu fiche là, Rekke ?

-C'est plutôt à moi de te poser cette question ! »

Elle était à bout de souffle, Rekke. Si jolie dans sa robe bleue.

Si seulement...



31 Décembre 2010
« Rekke, Nikolaus. Nikolaus, Rekke. »

Il y eut un très bref moment de blanc, mordoré sur mordoré, avant que les deux jeunes gens ne se sourient pour mieux se faire la bise ; Hilde, au summum du bonheur, s'empressa de passer ses bras autour du cou de sa petite-amie dès que celle-ci se fut éloignée de son encore et toujours meilleur ami. Les deux adolescents avaient entendu parler l'un de l'autre par la grande blonde sans jamais s'être rencontrés jusqu'alors : et si Nikola avait dû jouer les conseillers conjugaux pour aider son amie à gérer les sentiments qu'elle avait rapidement développés pour la brune, le contraire n'était pas moins valable. Elle avait longtemps demandé à Rekke si elle avait bien fait de faire certaines choses, si elle en avait mal fait d'autres ; si tout ce qu'elle avait fait jusque là n'était pas, en somme, une sombre pile d'erreurs toutes plus bêtes les unes que les autres.
Entre ses jolis bras si fins, elle avait su la rassurer sans avoir à prononcer le moindre mot.

Cette soirée de nouvel an, pour elle, était comme l'aboutissement d'un nouveau chapitre de sa vie. Elle voulait trinquer à tout et n'importe quoi, rire rire rire – tomber dans les pommes, être réveillée par un baiser de sa princesse et ne plus jamais, jamais se réveiller tout à fait. La réalité pouvait bien attendre tant qu'elle le souhaitait ; elle, elle avait mieux à faire. Comme rouler sur le canapé, attraper les verres des autres pour les finir, danser, danser, danser, danser.
Jusqu'à l'ivresse, à en perdre la tête et toute notion de haut ou de bas.

A s'en rendre aveugle, Hilde.



« … Pardon ?

-Je te dis la stricte vérité. »



A s'en crever les yeux.



18 Septembre 2012
« Je m'en vais. Ça se voit, non ? »

Son cœur se serra devant les grands yeux pleins de larmes de la jeune femme qui lui faisait face.
C'est ça, oui ; qu'elle pleure. Elle ne céderait pas. Pas cette fois.

« Mais, Hilde... »

Je ne céderai pas. Je ne céderai pas.

« Je t'ai déjà dit que j'étais désolée ! »

Tellement cruelle. Toujours désolée. Toujours pleine de bonne volonté.
Mais Hilde en avait plus qu'assez. Assez du regard fuyant de ses parents. Assez de se faire juger, assez de cette ville qui l'étouffait.
Alors elle partait. Elle voulait vivre, vivre, vivre – et pour ça, elle devait aller le plus loin possible d'ici.
Ses doigts se crispèrent sur la lanière de son sac ; elle détourna le regard. Le train ne devrait plus tarder.



11 Février 2011
« Rekke ?! »

Si elle s'était attendue à la voir là en ouvrant la porte ? Pas du tout.
Si elle voulait qu'elle soit là ?
Encore moins.

Dans un geste qui ne manquait ni de violence ni de volonté, elle commença à la fermer sur son joli nez ; et si elle cessa son manège lorsque deux petites mains vinrent pousser dans le sens contraire, ce fut uniquement parce qu'au fond, elle espérait régler les choses. Que ça s'arrange. Que tout aille mieux. Elle aimait Rekke ; ce qui s'était passé entre elles était vrai, beau. Elle ne voulait pas tout gâcher pour une stupide histoire de...
… Enfin.

« Qu'est-ce que tu fous là ? Je t'ai déjà dit que je voulais pas que tu viennes chez – her ! »

Sans se gêner, la petite brune rentra dans le hall. Elle savait parfaitement que son amie ne voulait pas d'elle chez ses parents ; devait se douter aussi, quelque part, que les concernés finiraient par être attirés par le bruit et viendraient voir ce qui se passait.
L'idée qu'elle puisse le faire exprès déchira le cœur de la jeune fille en deux.

« Sors de là !

-Pourquoi tu réponds pas quand je t'appelle ? Qu'est-ce que je t'ai fait, hein ? »

Il y avait des larmes, dans sa voix, qui réussirent à ébranler les belles convictions d'Hilde.
Pourquoi était-elle triste, hein ?
Tout était de sa faute. Tout.
Elle n'avait rien fait, elle.

Et c'était le monde entier qui s'écroulait sur sa tête.

« Tu peux pas me quitter comme ça ! Fais le correctement, au moins !

-J'ai jamais dit que je voulais te quitter !

-Ça y ressemblait, pourtant !

-C'EST TA FAUTE, ARRÊTE ! »

Il y eut un immense moment de silence, dans le hall, quand le regard de l'adolescente croisa celui de ses parents. Choqués. Probablement emplis de plus d'incompréhension que leurs pauvres corps ne pouvait en contenir.
Dégoûtés, aussi.

... Et merde.

Clac.



Allô, Nikola ?

Mes parents m'ont virée de chez moi.



Accrochée à Rekke comme si c'était tout ce qu'elle avait au monde, Hilde pleura. Et pleura. Et pleura. Elle ne savait pas quoi faire ; ne savait plus où aller.

Les jours n'avaient pas d'importance.

De toute façon, le cycle se répétait sans cesse.

Un jour je t'aime, un jour je te détruis.

C'est bien ça, hein ?

Chérie.



18 Septembre 2012


« Hey, Hilde ? »



« Tu m'apprendras à réparer mon vélo, hein ? »

Bien sûr, Amleth.

« Tu me montreras comment on fait la roue ? »

Un peu que je vais te montrer !

« On se mariera, hein ? »

Tu es le seul homme de ma vie.

« Tes parents sont des gens bien. »

Si tu le dis, mamie.

« Fais attention à toi, mon chat. »

Promis.



Hela hela hela hela la...

Haaa... Haha.

... C'est bête, hein ?

« Tu m'aimes, dis ? »

...

Bien sûr que je t'aime !

A en mourir.


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