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Ewu
- 02 ἙλAS 06 ○× QP/ -

Ewu

En bref

Masculin
Pseudo : Nii'
Messages : 62




They've got it out for me ;
Like the only thing they've heard
Is that I'm not to be believed
Prénom : Ewu.
Surnom : Wu, Uwu.
Genre : Masculin.
Âge effectif : 851 ans.
Âge apparent : Difficile à dire. Jeune adulte.
Orientation sexuelle : Bisexuel (Daemon).
Groupe : Daemon.
Langues parlées : Fluide en anglais, igbo, afrikaans, kiswahili, lingala, portugais ; courant en roumain, hongrois, allemand, vieux norrois, breton ; il se débrouille en ossète et en vieux français et a des notions de latin, de grec et d'allemand ; il galère sur l'hébreu moderne et l'arabe.
Métier actuel : Cadre d'administration chargé de la vérification des effectifs et des données chiffrées inter-secteurs.
Casier Judiciaire


▬ Péché capital principal :
▬ Péché capital secondaire :


Physique


« Oh my God, there's nobody who can set me right »


Ewu a l'air plus animal qu'humain aux yeux de beaucoup — la faute à sa tête. Pourtant, malgré son petit côté caprin, il reste nettement humanoïde. Il a des épaules, des hanches, un torse ; cinq doigts, dont un pouce, et des bras comme on en trouve décidément pas chez les chèvres (à part peut-être sur internet). S'il avait une tête plus humaine, on lui trouverait sûrement des airs de faune. Mais comme il a un museau et un joli pelage, forcément...
Du haut de son mètre soixante-neuf, Ewu se trouve un peu petit ; mais c'est surtout qu'il a côtoyé beaucoup de gens plus grands que lui. Parce qu'il est fin et a le torse allongé, on aura tendance à le penser un peu plus grand qu'il ne l'est. Il fait grand, en fait — donne l'impression de l'être, même si à l'évidence ce n'est pas le cas. Histoire de ne perdre aucun malheureux centimètres, il a appris à se tenir droit. Ce n'est pas toujours une mince affaire, avec ses pattes de chèvre, mais il fait ce qu'il peut. Parce qu'il court peu (voire jamais), ça fonctionne plutôt bien.
Son corps, comme sa tête, est couvert d'une fourrure brune épaisse et douce au toucher — parce qu'on ne rigole pas avec l'entretien de sa personne. Il prend soin de lui et sent toujours bon. Il s'en occupe avec la même importance qu'un autre couvrirait ses cheveux d'attention ; quand elle rebique de partout et est rêche au toucher, ça l'insupporte. Elle doit être belle. Épaisse. Régulière. Il y tient.
Il n'y a que sous ses vêtements, au niveau du torse et du dos, que la fourrure est moins dense et laisse plus facilement la texture et la couleur de sa peau se faire sentir dessous. C'est cette partie, incidemment, qui est la plus humaine ; la forme de son torse est clairement empruntée à ses cousins Commoti et Quieti. La seule chose qui l'en différencie est la deuxième paire de bras, juste sous la première, un peu en arrière dans son dos. Elle est en tout point semblable à la première paire, et très humaine là encore — il a des coudes et des épaules et des poignets et des phalanges, comme beaucoup. Ses mains se finissent sur des doigts sans ongles, dont le bout un peu pointu et plus dur que le reste fait penser à des griffes plus qu'autre chose. Elles ne sont pas vraiment pointues, ceci dit — il ne pourrait rien percer avec. Celles de sa deuxième paire de bras sont un peu plus marquées, et feraient un peu plus mal s'il décidait d'agripper quelqu'un avec. Quoi qu'il en soit, il n'a aucun problème à les utiliser et peut se saisir aussi bien de mobilier que de crayons ou effectuer des tâches minutieuses.
Dans son dos, le tracé de sa colonne vertébrale est marqué. Il a également des os qui ressortent un peu avant la taille pour former de drôles d'arabesques, quelques centimètres au-dessus de la peau, et vont se rattacher à sa colonne au niveau de ses hanches. Ceux-ci sont de la même couleur que ses cornes — un mélange de gris, de brun et de bleu. Il n'a aucune sensation à leur niveau, à moins de se faire jeter dos à plat contre un mur. Là, forcément, la sensation est désagréable.
Un peu plus bas, au niveau du bassin, se trouve la base de sa queue. Elle est longue ; quand il marche, s'il ne fait pas attention, le bout traîne par terre. Rien à voir avec une queue de chèvre, d'ailleurs. La longueur est fine et couverte de peau, avec une large touffe de poils à son extrémité qui pourrait plus facilement rappeler celle d'une vache. Elle est de la même couleur que le reste de son pelage.
Ses pattes ressemblent franchement à celles d'une chèvre, avec des sabots. Il marche sur la pointe des pieds ; de fait, sa démarche peut parfois sembler bizarre à ceux qui n'en auraient pas l'habitude. Il a tendance à sautiller quand il veut aller plus vite, et allongera facilement les foulées. C'est plus facile pour lui que de piétiner. Son équilibre est bon (l'habitude aidant) mais malgré tout, il est plus à risque de chute que des humains mieux plantés sur leurs jambes. Quand on le pousse sur le côté, il a parfois du mal à se récupérer. Être aussi léger n'aide pas.

Et ne reste que sa tête. Comme dit précédemment, elle ressemble à celle d'une chèvre ; les différences sont assez minces, et ne se constateraient mieux qu'avec l'animal en question à côté pour comparer.
Premièrement, il a un museau. Sa tête est donc bien plus allongée vers l'avant que celle d'un humain. Ses dents sont petites ; il en a sur la mâchoire inférieure, et quelques-unes dont il ne sait trop que faire sur la supérieure. Son nez est au bout de son museau, comme sur celui d'un caprin. Les deux grandes oreilles sur le haut de son crâne sont percées tout du long de boucles d'oreilles qu'il ne remarque guère plus, depuis le temps, et ne change ou n'enlève que rarement, quand il en trouve une nouvelle qui lui tape dans l’œil et constate tristement ne plus avoir de places pour en rajouter d'autres. Sur son front et entre ses oreilles, Ewu possède également trois paires de cornes. La plus petite est sur son front, un peu en avant, et ne dépasse de sa tête que de quelques centimètres ; elles sont coniques et arrondies au bout. Les suivantes, positionnées juste derrière les premières, sont bien plus imposantes et se recourbent vers l'arrière jusqu'à revenir pointer vers sa nuque. Elles ne sont pas très pointues également, mais couvrent bien plus de surface et sont difficiles à rater. La troisième paire se situe derrière la deuxième, à peu près au milieu, et pointent un peu vers l'arrière avant de revenir pointer vers l'avant à un angle de quasiment 90°. Celles-ci sont pointues ; les toucher ne ferait pas de mal, mais mieux vaut éviter d'y appuyer la main de toutes ses forces. Ça pourrait être plutôt désagréable (pour lui aussi, ceci dit, donc il ne vous laisserait pas faire). Elles sont toutes d'une teinte entre le gris et le bleu, irrégulières, et tendent doucement vers le bleu foncé à mesure qu'on se rapproche de la pointe. Elles ressemblent à un minéral quelconque plus qu'à de la kératine ou de l'os seul.
Ses yeux sont ambrés et ont la pupille horizontale, mais sont un peu plus centrés que ne le sont ceux des caprins habituellement. Toujours plus écartés qu'un humain standard, mais malgré tout. Pour quelqu'un qui s'y connaitrait en boucs, ce serait facile à remarquer. Il est de même plus expressif qu'un animal, pour une raison ou une autre. Il y a quelque chose d'humain dans ses mimiques et sa gestuelle, sûrement ; avec la voix un peu grave en prime, on oublie vite qu'on parle à un type à tête de bouc.
Peut-être.
Niveau vestimentaires, Ewu n'est pas trop accessoires mais aime avoir une apparence convenable. Il ne sortirait jamais sans le haut ou le bas — impensable. Il porte le plus souvent des chemises aux couleurs parfois éclectiques, souvent bizarres, typées motifs africains si possible parce qu'il adore ça ; pour le bas, un pantalon simple et souple, un peu ample, qui s'arrête un peu sous ses genoux. Soit ça, soit des shorts. Il ne porte jamais rien qui va plus bas, pour la simple et bonne raison que ça gênerait ses mouvements. Ses pattes ont besoin d'être libres.


Caractère


« I've been sent to torch the palace down in broad daylight »


Ewu est âgé. On pourrait de fait s'attendre à ce qu'il ait un petit côté papi grognon ; qu'il ait du mal à s'adapter. Que voir les petits nouveaux courir partout le fatigue à n'en plus finir. Qu'il en ait marre, un peu.
Ce n'est pas le cas.
En plus de ne pas avoir vieilli physiquement, Ewu ne se sent pas plus vieux mentalement qu'il ne l''était à sa naissance. Il n'est ni vraiment plus mature, ni tellement plus patient ; il est plus cultivé, en revanche, et moins naïf qu'avant. Il est aussi plus nerveux, plus solitaire. Moins honnête. Moins disponible.

Force est de constater qu'en huit cent ans, on ne peut pas rester tout à fait le même.

Si Ewu serait décrit comme discret par la plupart, c'est qu'il fait des efforts monstres pour l'être. Au naturel, c'est un garçon qui parle très fort ; qui rit trop vite, pour trois fois rien, et apprécie le contact tout comme la conversation. Il n'était à l'époque pas rare de l'entendre hurler (littéralement) lorsqu'il trouvait quelque chose d'intéressant ou de joli, de fait estimé rare par ses soins — et puisque ça arrivait plus que de raison à la bibliothèque, il n'a jamais eu très bonne réputation auprès des employés.
Chassez le naturel et il revient au galop, comme on dit. Sitôt qu'il se sent un peu en confiance ou qu'une conversation le passionne, Ewu perd toute discrétion quelle qu'elle soit. Il faut qu'on lui dise de calmer ou qu'il se rend compte qu'il crie en public (encore et toujours) pour qu'une grimace anxieuse ne vienne remettre son enthousiasme sous clef. L'excédent, en tout cas.
Très curieux, le daemon aime découvrir de nouvelles choses et en apprendre toujours plus sur toute sorte de sujet. Il est capable de rester bloqué sur la même chose des semaines, voire des mois durant si on le laisse faire. Cette tendance a été un peu calmée depuis qu'il a un travail, puisqu'il est obligé de se détacher de ses recherches ou contemplations à minima une fois par jour — rétrécissant donc sa fenêtre d'obsession à quelques heures maximum à la suite. Ce n'est pas une mauvaise chose, franchement. Il a la sensation d'apprendre moins vite comme ça, mais tant pis. Il faut ce qu'il faut.
Très peureux, Ewu n'aime pas la violence mais se défendra s'il le faut. Il préfère fuir le conflit que le causer, mais son honnêteté aura tendance à lui faire sortir les armes sans le vouloir lorsqu'il se sent obligé de demander des explications à quelqu'un sur une attitude ou un acte quelconque. Il ne veut pas se battre, mais il ne veut pas laisser les choses se faire non plus. Or si vous allez expliquer à quelqu'un qu'il ne devrait pas frapper quelqu'un d'autre, bon... Ça finit rarement bien.
Il s'immisce moins dans les problèmes des autres depuis un certain temps, mais parfois c'est plus fort que lui. Il doit physiquement s'empêcher de ne pas foncer dans le tas, parfois, et se retrouve frustré en retour. Il déteste laisser les choses en plan, sans explications, sans justifications. Il aime que tout soit bien rangé et que chacun soit content. Plus ou moins.
Oh, il sait que tout le monde n'est pas gentil, bien sûr — et il ne compte pas changer qui que ce soit, c'est impossible. Si ça doit se faire, ça se fera tout seul. Mais leur faire remarquer que leur attitude est déplorable, ça, il est bien obligé.
Les quatre mains d'Ewu se retrouvent régulièrement nouées entre elles ou plaquées sur son museau ou sa tête lorsqu'il stresse trop. Il se mure souvent dans le silence, laisse filer des rires forcés, et fuit sans demander son reste dès que la situation tourne à son désavantage. Il n'est courageux que les premières minutes, quand il y a ne serait-ce qu'un pourcent de chance que ça ne tourne pas mal. Ensuite, il fuit. Il ne veut pas avoir plus d'ennuis.
Champion du mensonge par omission et des détournements de conversation, le jeune homme est intelligent dans un sens strictement scolaire. Il apprend vite, fait facilement les liens, voit les corrélations là où il y en a, calcule à la vitesse du son. Pour ce qui est de réfléchir à tout ce qui vient du social, décrypter les gens, savoir quoi dire ou quoi faire, s'attendre aux réactions des autres, à ce qui risque d'arriver s'il fait ceci ou cela, il n'est vraiment pas aidé. Il va trop vite, trop bêtement, et s'étonne que ça tourne mal. Il réfléchit rarement avant d'agir.
Il essaie de corriger ça, mais c'est difficile. Alors du coup, il évite de trop agir tout court. Ça aide.
Du reste, Ewu est nerveux. Vite stressé. Sur ses gardes. Secret. Il n'aime pas parler de lui. Se trouve des excuses pour ne pas avoir faire ceci ou cela constamment, tout le temps, au point où c'en est fatiguant. Il sort rarement du trajet tout tracé entre sa maison et son lieu de travail. Et même quand il le fait, il ne va jamais très loin. Il ne peut s'empêcher d'écouter les autres. Pas d'espionner, non — surtout pas — mais écouter ce qui se dit. Ce qui se passe. Prête une oreille attentive aux rumeurs, même s'il s'en tient éloigné comme la peste. A l'air sociable, quand on lui parle, mais a du mal à garder des amis quand ils ont constamment l'impression qu'il ne veut pas les voir ou se fiche d'eux. Ce n'est pas le cas ; il a simplement du mal à expliquer certaines choses, et se retrouve souvent pris entre deux feux. De fait, il ment et s'emmêle les pinceaux et regrette d'avoir parlé à qui que ce soit.
Il n'est pas méchant, mais pas toujours gentil non plus. Est diplomate, autant que possible, malgré un côté immature très prononcé qui ressort quand on lui cherche des noises ou que quelqu'un se la joue passif-agressif avec lui. Il n'est jamais contre une blague stupide et ne sera pas le dernier à rire du malheur des autres, même s'il aidera sans doute le concerné ensuite. Il est très soigneux. Très minutieux. Adore lire. Collectionner. Observer. Vit bien la solitude, mais uniquement lorsque c'est lui qui se l'impose. Quand il veut voir des gens, il aime savoir qu'il y en a plusieurs à qui il pourrait aller dire bonjour.
C'est un bon travailleur appliqué et sérieux. Il a la rancune tenace, par contre, et plus de patience pour les Daemon que les humains.
Et il a des avis sur tout, bien sûr, mais il ne peut les donner à personne. Il a une sale réputation de menteur (voire de mythomane) qui lui colle aux sabots, et elle a tôt fait de ressortir quand il dit quoi que ce soit d'un peu différent de d'habitude — alors il a appris à sa taire, puisque de toute façon personne ne le croit.
A force, il s'est résigné. C'est juste comme ça.



Histoire


« I wanna know who you told 'til it's nobody anymore »


Ewu est né dans la forêt.
Il s'est réveillé au pépiement des oiseaux et à la sensation d'un léger courant d'air dans son pelage ; quatre mains enfoncées dans la terre encore meuble d'une pluie récente, yeux grands ouverts, rivés sur la canopée. Le souffle lui est venu naturellement. La marche aussi.
La peur aussi.
Ewu s'est réveillé terrorisé.
La jeune femme dans les bureaux lui expliquera plus tard que c'est "parfaitement normal ; chacun réagit différemment". "Naître est un traumatisme, aussi." "C'est comme pour les humains." Et il la croira, bien sûr — ça fait sens, et il n'est pas le seul à s'être réveillé en panique — mais sur le moment, tout ce qu'il sait, c'est qu'il doit se cacher. Il est tout emmêlé de confusion et de réflexes vieux comme le monde ; si ses pattes lui disent de courir, il court. Alors c'est ce qu'il fait.

Sans surprise, ça ne le mène pas loin.

Il est en train de longer le ruban rouge des doigts lorsqu'on lui tombe dessus — assez littéralement. Il a juste le temps de glisser sur le côté, sous le ruban, pour éviter de se faire proprement couper en deux.
Son cœur bat à mille à l'heure. Il crierait, mais la panique lui coupe la voix ; rien ne vient.
Il voit la faux et l'uniforme. Des yeux vifs. Des cheveux gris. Entend quelqu'un parler.
Puis, d'un coup, le monde se met à tanguer. Tout devient flou.

Deux secondes plus tard, il s'écroule comme une masse.

« ... Sérieusement ? »



« J'ai tendance à euh — m'évanouir, quand je panique vraiment trop. C'est normal. »

Son amie lui fait la grimace, lèvres retroussées sur ses crocs.

« C'est nul, comme réflexe.

-Her, hein. Respect. J'y peux rien.

-Ben prends sur toi, un peu. Va faire du yoga. »

"Va faire du yoga". Bah tiens. Pourquoi il n'y a pas pensé plus tôt ? La solution miracle à tous ses problèmes.
Bras inférieurs posés sur ses cuisses, il craque ses phalanges une à une.

Tous mes problèmes, ha.



Si on lui pose la question, il n'en a pas. Ou rien de grave. De petites broutilles de-ci de-là, d'accord, mais rien de plus qu'un autre.
Il y a bien la baignoire qui n'arrête pas de se boucher, et plusieurs de ses placards qu'il devrait vraiment faire remplacer, depuis le temps, mais c'est à peu près tout. Sa maison est un petit peu vieille. Comme lui.
Comparé à ce que d'autres vivent, ça peut difficilement être entendu comme un problème. C'est juste embêtant. Ennuyeux. Agaçant. Ça lui tape sur les nerfs. C'est tout.

Mais de toute façon, on ne la lui pose pas. La question.

Logique, en même temps.
On ne demande pas à quelqu'un qui va bien si ça ne va pas.

... Et c'est un peu le but, vraiment. Alors il ne se plaint pas.



Ne se plaint plus, du moins.

Les cinquante premières années que passe Ewu à Asphodèle, il trouve quelque chose à redire à absolument tout. Son lit n'est pas confortable. Sa table est trop haute. Toutes les chaises ne sont pas adaptées à sa queue. Il ne veut pas avoir à payer — pourquoi est-ce qu'il faut travailler, déjà ? Il balaie le sol des pattes et de la queue, yeux plissés, et soupire chaque fois qu'il se prend quelqu'un dans l'épaule ou se fait tirer les cornes par un passant trop curieux à qui il n'aura pas su dire non.
Il a envie de rire et de s'amuser, pas de s'enchaîner à un travail ou à d'autres personnes au long terme. Alors c'est ce qu'il fait. Personne ne l'en empêche, après tout. Il n'est obligé de rien.
Il passe beaucoup de temps dans le train. Explore chaque zone, chaque endroit où il a le droit d'aller. Il aime observer. Si la curiosité est un vilain défaut, celle d'Ewu ne l'emmène jamais au-delà des limites — loin de là. Il reste même un pas derrière, content de pouvoir juste poser les yeux sur chaque chose. Tout est joli. Tout est intéressant. Il s'émerveille d'un rien et prend des notes mentales de tout ce qui lui passe sous les mains.
Plus les années passent, plus elles lui semblent courtes. Quand il se décide à aller arpenter la bibliothèque et trouve des livres puis des tuteurs pour lui apprendre de nouvelles langues et de nouvelles cultures, l'impression va en empirant ; il peut passer des semaines enfermé chez lui à étudier les mêmes livres, partie par partie, avant d'enfin avoir les pattes engourdies et de vouloir se changer les idées. Il apprend tout des pays d'Afrique, de leurs langues à leurs coutumes — puis c'est autre chose, et encore autre chose. Il n'en a jamais assez. Il aime tout savoir. Remarquer les détails. Faire des liens.
Ewu est intellectuel. Scolaire. Il a besoin d'utiliser sa tête, même s'il aime les travaux manuels.

Alors quand, au bout de cent ans, il en a assez de ne jamais avoir d'argent pour rien, il se décide à chercher un travail.

Par soucis de facilité, il demande une évaluation. Yeux rivés sur le papier lui expliquant les secteurs publics dans lesquels il peut travailler, il réfléchit. Être dans la police ne l'intéresse vraiment pas. Il n'a pas le caractère à ça ; on le recalerait dès le premier entretien, c'est sûr. Il adorerait travailler à la bibliothèque, mais il craint de ne passer tout son temps à lire au lieu de ranger ou de conseiller. Puis il est bruyant. Quand il n'est pas occupé à quelque chose, il a tendance à rire trop fort et à parler dix tons au-dessus de ce qu'il devrait — les bibliothécaires lui ont plusieurs fois demandé poliment de se taire, et il ne souhaite pas renouveler l'expérience.
Parce qu'il juge n'avoir rien à perdre, qu'il sait écrire et lire plusieurs langues et n'a aucun problème avec des tâches répétitives, il demande un poste aux bureaux.
On accepte sa candidature sans le moindre problème. Au début, on l'assigne à la coordination des plaintes mineures. Il trie les feuilles par ordre alphabétique, les glisse dans un dossier et les fait passer au bureau suivant. Simple.
Ennuyeux.
Malgré tout, il s'y applique avec un acharnement presque étonnant. Au bout de quelques années, ça finit même par lui plaire. Ses collègues sont acceptables, quoi que très humains ; regarder les noms passer et repasser, yeux posés furtivement sur les lignes que remplissent les plaintes, l'intrigue et l'intéresse. Il en voit certains revenir. Note sans y penser des corrélations et des habitudes. Les humains aiment beaucoup se plaindre de leurs voisins. Ou de leurs colocataires. Il y a aussi des vols de vêtements. Des insultes. Des blasphèmes. Ce sont les plaintes mineures alors forcément, il n'y a pas grand chose à y comprendre — mais malgré tout, il y prend un certain plaisir. C'est drôle. C'est vivant.
Le silence et l'efficacité d'Ewu en font un employé modèle. Avec quatre mains bien coordonnées et un esprit pratique non négligeable, il finit ses tâches avec de l'avance et sans jamais se plaindre ni faire de vagues. On le complimente.
Il aime les compliments, alors tant mieux. Il ne compte pas les décevoir.

C'est toujours terrible, de décevoir quelqu'un.



« Comment ça, parti ? »

Son collègue hausse les épaules.

« Parti. Plus là. Je sais pas. Y'a des gens qui partent, tu sais bien. »

Il ne sait pas, non. Il n'a jamais fait attention.
Ses doigts tapotent nerveusement une feuille blanche. Elle se froisse un peu.

« Ils partent où ?

-Qu'est-ce que j'en sais, moi ? Peut-être que genre... On ressuscite, à un moment. Pouf. »

L'expression sur le visage de son collègue lui fait plisser les yeux. C'est ce qu'il croit, ça ? Qu'il va ressusciter ?
L'idée de la mort n'est pas étrangère à Ewu ; il a longuement étudié les rites mortuaires de certaines cultures. Les humains naissent bébés, du ventre d'une femme, et grandissent. Vieillissent. Puis ils meurent et, enfin, arrivent à Asphodèle.
C'est l'hypothèse la plus répandue, du moins. Personne ne se souvient de sa mort. Aucune exception. Le passage d'un monde à l'autre est du coup un peu flou.

Tout peut être arrivé. Pour autant, tout le monde est d'accord sur le fait que "je suis mort et maintenant je suis dans l'après-vie". Hypothèse soulevée uniquement parce qu'on le leur affirme — mais bon. Il admet ne pas très bien voir pourquoi on leur mentirait à ce sujet.

Il a essayé de demander à certains humains ce qui se passerait selon eux s'ils ressuscitaient, mais aucun ne sait trop quoi dire. Certains supposent que leur âme va flotter jusqu'à retrouver une vie ailleurs, dans un embryon quelconque ; d'autres pensent qu'ils vont reprendre une nouvelle vie sous le même nom et le même physique, mais différemment. D'autres encore pensent devenir une plante. Un animal.
C'est confus au mieux, ridicule au pire — mais Ewu est prêt à les croire.
Il croit qu'ils le croient, en tout cas. Lui n'est pas humain. Ça ne le concerne qu'à demi. Peut-être même moins.
Ce qu'il note, en tout cas, c'est que si la plupart ne disent rien face à un ami qui disparait, c'est que le cycle naturel doit leur sembler trop naturel, justement, pour être remis en question. Personne ne sait où ils sont partis, alors... C'est qu'ils ne sont plus à Asphodèle.

Et s'ils n'y sont plus, c'est qu'ils sont en vie.

Sûr que c'est plus joli à imaginer que s'évaporer dans le néant sans raison. Il comprend.

Un peu trop bien, peut-être.



Au bout d'un temps, on confie plus de responsabilités à Ewu. Les yeux dans les plaintes, il scanne rapidement chaque ligne avant de passer à la suivante. Mauvaise habitude. Il aime tout regarder. Pas comme si on ne s'attendait pas à ce qu'il pose les yeux dessus, de toute façon. Il les a en mains. Ils savent qu'il va les lire, même brièvement. Il est là pour ça.
Ne pas voir certaines choses revenir le laisse perplexe — mais ce n'est pas son travail, de questionner ce qu'on lui donne, alors il se tait. Il est payé pour trier. Il trie.

Simple.

Autant il aime rire et s'amuser avec ses voisins et ses amis, autant partager questionnements et inquiétudes ne lui passe jamais par la tête. Il se rend compte de, note que, mais ne va jamais au bout de l'idée. Les informations restent en arrière-plan. Il n'y prête pas d'attention excessive. C'est juste... Là. Plein de petits points dans lesquels il a trop souvent le nez pour être capable d'y voir autre chose que des points.

De toute façon, ce n'est sûrement que ça.
Il a mieux à faire que de s'inquiéter.



Deux cent ans, déjà.

Vu la tête des nouveaux arrivants, il suppose que ça fait beaucoup.

Il a l'impression que sa rencontre éclair avec une faux et des bottes grises était hier, pourtant. Ça lui a fait forte impression. Quelle idée de passer dans les hors-limites deux minutes après sa naissance, aussi ? Quel imbécile.
Au moins, ça lui a passé l'envie de recommencer. Il se tient loin des lignes rouges.
Sacoche sur l'épaule, il rentre dans les bureaux et voit les mêmes bottes grises passer en sens inverse. Ce n'est pas rare de voir certains gardes aller et venir devant les bureaux, vu qu'ils y amènent les humains, mais il y en a deux qu'on voit moins souvent.
Ewu reste rarement dans l'entrée pour les voir, ceci dit. Ils lui font peur.

Son regard croise vaguement le sien. Il reçoit un sourire et un signe de la main en retour. Sa collègue, avec qui il est arrivé, y a droit aussi. Elle rigole bêtement.

Sourcils froncés, il se frotte un bras de la main opposée.

« Ewuuuu, tu viens ? Tu vas pas l'avoir, sa photo, c'est pas la peine. On peut essayer de lui demander son 06, mais euh...

-... Les gardes n'ont pas de numéro. Et je ne vais sûrement pas aller lui demander le sien.

-Mais non, son 06 ! Genre son portable, son — rah, laisse tomber. Tu fais exprès. »

Oui, il fait exprès. Et alors.
Ses traits crispés tirent un haussement de sourcils à la demoiselle.

« Ça va ?

-... Oui oui, ça va. J'arrive. »



Le temps passe. Il a des questions dans un coin de la tête, mais aucune réponse.

Avec le temps, il laisse filer. Oublie. Pense à autre chose.

Cent ans s'écoulent. Cent ans à faire son travail, être promu, se faire des amis, sortir avec d'autres Daemon, se fâcher de-ci de-là, manquer de peu de se prendre des poings dans la figure, se poser des questions de privilèges et de racisme, s'ennuyer, apprendre, découvrir, redécouvrir.

Cent ans avant que, pour la première fois de son existence, il ne meure.



C'était stupide. Il voulait juste vérifier quelque chose.

Moralité : mourir est très douloureux. Il ne veut plus jamais expérimenter une chose pareille.

Tête tenue à quatre mains, assis au bord de son lit, il soupire jusqu'à ne plus en avoir d'air à souffler.

T'en as encore beaucoup, des idées comme ça ?

Non. C'est la dernière.
Il a fini de réfléchir pour au moins mille ans.



... Dit-il. En fait, ça ne dure pas aussi longtemps.



Monter en grade ne veut pas dire que le travail d'Ewu est moins ennuyeux et répétitif. Certains de ses collègues se plaignent que le leur est trop imprévisible, ceci dit — et parce qu'il n'est pas sûr d'être très qualifié pour gérer les choses imprévisibles et les gens qui hurlent, il est bien content d'avoir un travail simple. Au moins, il sait à quoi s'attendre.
Après avoir fait de la traduction et avoir été assigné à recopier certains documents plus importants (il peut facilement recopier avec ses deux mains droites à la fois, alors bien sûr), on lui fait passer un entretien. Il n'est pas trop sûr de ce qu'on attend de lui au juste, alors il se contente de répondre honnêtement. Après avoir revu avec lui ce qu'il avait déjà fait et ce dont il était capable ou non, on le poste à la vérification des effectifs et des données chiffrées inter-secteurs. Autant de grands mots pour dire peu de choses, au final — il se contente de vérifier et de recopier les feuilles d'effectifs de tout et n'importe quoi venant de chaque secteur des bureaux pour les remettre aux décisions centrales. Ils sont plusieurs à faire ça, à priori, mais il ne sait pas qui sont les autres. Il a son propre bureau.
Plus il monte en grade, plus la hiérarchie d'Asphodèle le laisse perplexe.

Mais bon. Il est payé. Savoir qui exactement est au-dessus de qui exactement importe peu.

Les yeux d'Ewu suivent les chiffres. Les en-têtes. Certains écrivent plus mal que d'autres. Une tragédie. Ils devraient donner des cours d'écriture manuscrite à tout le monde.
Les petits points continuent de s'entasser derrière ses yeux. Quelque chose le chiffonne — mais il n'arrive pas à savoir quoi et franchement, il n'est pas sûr de vouloir, non plus.

Index posé sur une ligne, joue contre son poing, il mâche le bout de son crayon.

... Est-ce qu'il a vraiment le choix, en fait.
Huh.



Ewu est bêtement honnête.

De tous ses problèmes, c'est sûrement le pire.



« Non, ça ne me regarde pas. Mais — »

Tais-toi.

« ... Oui. Je comprends, bien sûr. Mais c'est juste — bizarre. J'ai cru que j'avais fait une erreur. C'est pour ça que... »

Tais-toi.

« Bien sûr que non ! »

Tais-toi.

« ... Non, je — »

Nom de Dieu, Ewu, tais-toi.



Assis à son bureau, Ewu fixe les tas de feuilles blanches parfaitement rectilignes posés dessus.
Quand on vient vérifier ce qu'il fait, il se raidit. Sa deuxième paire de mains se noue sous la table. De la première, il saisit les feuilles et se met à les trier.
Dès que la porte s'est refermée, il recommence à les fixer sans savoir quoi en faire.

Tête dans les mains, il laisse filer une longue plainte muette.



Il ne sait pas qui a dit quoi à qui, mais il sait qu'on a dit quelque chose sur lui. Voire plusieurs quelques choses. Il sait que ses plaintes ne remontent jamais nulle part. S'il a le malheur de vouloir en déposer une, on le regarde de travers. Il entend des gens parler de lui dans son dos. On ne l'écoute pas. A minima, on le prend pour un menteur. Il n'a rien dit, pourtant.
L'amertume lui ronge la langue.

Qui a dit quoi à qui ?

Lui, à personne.
Mais on ne le croit pas.

Il n'a eu le temps de rien faire mais déjà, personne ne le croit plus.

C'est malin, ça. Simple et efficace. Presque trop simple.

... Mais ça fonctionne.



« J'aimerais démissionner. »



Assis à son bureau, Ewu fixe les tas de feuilles blanches parfaitement rectilignes posés dessus.

A défaut de pouvoir hurler, il se cogne la tête contre la table.



« ... Comment ça, "non" ? »



« Tu peux pas venir ? A la bibliothèque ? T'es malade ou quoi ? »

Les épaules d'Ewu s'affaissent. Il soupire ; sourit. Joint ses deux paires de main devant lui, juste assez excessif pour avoir l'air crédible.

« Je suis désoléééé. J'ai trop hurlé, je suis interdit d'y aller pendant encore une semaine. »

Son amant plisse les yeux. Grommelle.

« T'es toujours puni. T'en as pas marre d'aller gueuler dès que t'as le droit d'y retourner ? Fais gaffe, un peu. »

Il met sa main en visière tel un militaire obéissant. Oui capitaine. Il fera attention la prochaine fois.

Promis juré.



« Ewu ! T'avais promis, sérieux ! »

Il lui offre un sourire désolé.

« J'ai, euh. Pas envie, aujourd'hui. Mais tu peux y aller, toi, hein ! Je te. Retiens pas. »

Il plaisante, mais le cœur n'y est pas. Il déteste ça.
Les sourcils froncés, les lèvres pincées. Les "je sais que tu mens, Ewu." "Mytho." "Arrête de dire des conneries, Ewu." "Si tu veux pas qu'on sorte, t'as qu'à le dire carrément." "Tu mens pour le plaisir ou c'est quoi le délire, en fait ?" "Pourquoi tu viens pas chez moi ?"

A force, il est vraiment devenu un menteur.

Si ce n'était pas si frustrant, il en rirait presque.
Parce que ça, il l'a fait tout seul comme un grand.



Au bout d'un moment, il se coupe de ce qu'il avait encore d'amis. Il se contente d'aller de chez lui aux bureaux. C'est plus simple pour tout le monde. Pas besoin de réfléchir. Il se met en veilleuse et attend.
Mais ça l'énerve. Ça l'ennuie. Ça le frustre.
Les années suivent les années suivent les années. Il regarde le monde du coin de l'oeil. Déplace des feuilles d'un côté à l'autre du bureau. Regarde les gens discuter. Discute avec eux, parfois — mais jamais trop. Il a envie de parler mais peur de ne pas savoir quoi dire pour se justifier, parfois. Alors il laisse tomber. Attend. Regarde les années suivre les années suivre les années.
Il se demande combien de temps ça peut durer. Longtemps, à priori.

Doigts sur le bureau, assis sur le lit, debout dans la rue, il soupire et regarde autour de lui.

Rien ne change. Tout change. Il n'est pas trop sûr de savoir quoi. Comment. Pourquoi. Il flotte un peu.

En retrait de la foule, face à l'estrade qui surplombe les bureaux, il croise et décroise des bras nerveux en écoutant les gardes faire leur annonce. Les petits points lui font mal aux yeux.

Langue mordue, il soupire de plus belle et fait demi-tour.
Pas le temps de rester à s'inquiéter avec le reste du monde.

Il a du travail. N'est-ce pas.


Ewu ▬ « Don't you worry about what change brings » 190802100517949774
     
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