Aussitôt que la jeune femme a passé le seuil de la porte, Acheron avance à sa suite et la ferme derrière eux. Aucun commentaire ne sort plus alors d'entre ses lèvres closes.
Ses longues enjambées tranquilles, pour ne pas dire lentes, trouvent d'abord le soutien de la faux qu'il tient dans sa main droite ; à la façon d'une canne, elle vient heurter le sol et rythmer leurs pas d'un tap tap régulier. En dehors de ça, la cadence du garde fait loi. Il ne tourne pas la tête vers la demoiselle qu'il escorte, pas plus qu'il ne l'agite de gauche à droite pour retrouver son chemin ou prêter attention au décor : sa démarche comme son regard font penser à un somnambule plus qu'à un militaire.
Il semble savoir où aller, au moins. Le contraire serait étonnant.
L'espace tranquille se fait rues peu fréquentées, puis zone urbaine de plus en plus dense ; le bras qui pourrait venir s'assurer de garder la décédée près de lui reste à sa place. Personne ne les approche, quoi qu'il en soit. Il est coutumier de conserver une distance de sécurité entre soi et les gardes. La faux sur laquelle il s'appuyait, en revanche, est rangée dans son dos dès qu'ils dépassent la limite entre résidences et centre-ville.

Une fois arrivés devant le bâtiment des bureaux, il ouvre la porte et attend que la jeune femme y soit entrée avant de la suivre à son tour.
Posté à sa droite, il désigne du menton le bureau à leur gauche. Un jeune homme y est penché sur des feuilles, l'air concentré.

« Veuillez vous rendre là-bas. Ils vous expliqueront tout ce que vous avez besoin de savoir. »

Bras contre le torse, il exécute un salut poli.

« Ce sera tout pour moi, mademoiselle. Passez une bonne journée. »

Redressé, l'air las, il fait demi-tour sans se retourner.

► Vous devez répondre pour signifier que vous vous adressez au bureau susnommé. Vous avez le droit également de décrire votre cheminement jusqu'aux bureaux, vos impressions, etc.
Ensuite, un PNJ vous répondra pour vous accueillir.

Dans un silence des plus religieux, Aurora suivit cet homme dont elle n'avait pas pu toucher les mèches neige. Marchand au même rythme que lui juste derrière, elle n'avait cessé de les regarder flotter doucement sur sa nuque. Ses yeux vaguèrent un peu de-ci de-là, vers le ciel sans nuage ni soleil et les bâtiments en teintes de gris. L'atmosphère était étrange, un peu lourde ; bien loin de tout ce qu'elle connaissait.

Durant le voyage qu'elle ne vit pas passer, la jeune femme eut cependant le temps de se remettre en tête ce que l'Autre lui avait raconté. Décédée. Asphodèle. Tous les gens qu'elle croisait dans des vêtements monochromes et certains autres coiffés de cornes aiguisées. Décédée ?

Aurora cligna un peu des yeux quand son guide finit par s'arrêter et lui ouvrir la porte d'un drôle de bâtiment. A l'intérieur, des bureaux comme s'ils s'étaient retrouvés à la poste. Elle pénétra pourtant les lieux sans plus d'objection.

« Veuillez vous rendre là-bas. Ils vous expliqueront tout ce que vous avez besoin de savoir. »

Dans son dos, il la salua avant de prendre congé mais, quand elle se retourna pour lui renvoyer un signe de politesse, il avait déjà disparu. Aurora soupira doucement, tout doucement. Il lui semblait difficile de faire autrement. Elle n'avait pas spécialement envie de parler. Peut-être qu'en arrivant, elle se rendrait compte qu'elle ne se souvenait plus comment il fallait faire ?
Bah.

Toujours calquée sur le rythme un peu lent de l'Autre, Aurora s'approcha du bureau qu'on lui avait indiqué. L'homme qui s'y trouvait avait l'air concentré, et qui était-elle pour le déranger.
Elle posa donc simplement ses mains sur la matière du bureau et attendit sagement qu'il ait terminé.

Comme la jeune femme s'approche et attend sans rien dire, le garçon au bureau lui adresse un sourire poli pour lui signifier qu'il sera bientôt libre. Le temps de griffonner quelques mots impossible à lire, cachés sous la partie haute du bureau, et déjà il se redresse.
Elle n'aura eu à attendre que quelques instants. Malgré tout, il s'en excuse.

« Vous venez d'arriver, je suppose. » L'évidence étant là, il n'attend pas de réelle réponse de sa part avant de poursuivre. « Si vous avez la moindre question à me poser, essayez de la garder en tête pour plus tard. Je serai à vous aussitôt votre dossier rempli. »

Efficace et précis, il se saisit d'une feuille dans un tiroir, refermé à la volée, et la pose bien à plat sur le bureau, là où il peut écrire à l'abri des regards indiscrets.
Y compris celui de la concernée, incidemment.

« Je sais que la situation n'est pas banale, mais je vais avoir besoin de quelques informations avant de vous laisser continuer. Essayez d'être aussi précise et honnête que possible. Vous avez le droit de ne pas avoir de réponse, bien sûr. Il n'y a aucun mal à ça. Si vous veniez à vous sentir mal, n'hésitez pas à me le signaler également. »

Ses yeux bleus passent du formulaire à la jeune femme. Il lui laisse le temps de digérer ces quelques informations ; elles ont beau paraître triviales, elles restent importantes. Le contexte n'y est pas anodin. Il parait logique d'imaginer que quelqu'un venant d'apprendre sa mort aurait quelques problèmes à suivre une conversation, quelle qu'elle soit.
Une fois qu'il la pense prête à passer aux questions à proprement parler, il baisse le regard à nouveau et enchaîne.

« Pour commencer, je vais avoir besoin de votre nom et de votre prénom, dans cet ordre. Si vous ne vous en souvenez pas, vous pouvez me donner un surnom, ou un pseudonyme. Quelque chose qui fasse sens à vos yeux. Ensuite, j'aurai besoin de votre date de naissance, puis de la dernière date dont vous vous souvenez. Celle que vous donneriez si je vous demandais quel jour nous sommes. »

Pensif, il fait tourner le crayon entre ses doigts. S'il a conscience que cela fait trop de choses à retenir d'un coup, il n'en montre rien.

« Vos souvenirs risquent d'être un peu chamboulés, poursuit-il. C'est parfaitement normal. Ces questions sont juste à titres indicatives, et il n'y a pas de mauvaises réponses. Prenez votre temps pour réfléchir. »

Sur quoi il redresse bien le dos, croise les poignets sur sa feuille, et attend patiemment qu'elle lui donne quelque chose à noter.

La personne en face d'elle était impressionnante. Un talent propre aux personnes travaillant dans l'administration, à priori. Précision, clarté, efficacité, c'était ce qu'on leur demandait. Comme hypnotisée, Aurora ne pouvait s'empêcher de suivre les mains de son interlocuteur qui s'appelait « Johannes », si tel était bien ce que voulait dire la petite pancarte sur le bureau. Elle n'était pas sûre de comment cela se prononçait, cependant. Est-ce qu'il fallait faire rouler quelques lettres ? Sa langue vint humecter ses lèvres.

« Prenez votre temps pour réfléchir. »

Hm. Le prenant aux mots, Aurora acquiesça légèrement et ferma les yeux, rembobinant le flot des informations qu'il lui demandait.  Son nom et son prénom, ça le faisait encore.

« Cavendish. Aurora. »

Elle prit soin d'épeler son nom et son prénom aussitôt. Ensuite, il lui fallait sa date de naissance qui lui revint aussi naturellement, comme s'il y avait des informations mieux gravées que d'autres. C'était une expérience intéressante que de vivre cette situation témoignant des différents types de souvenir.

« Je suis née le 13 Mars 1981 et ... la date d'aujourd'hui ... Nous sommes en Septembre ? 2023. Hm. Vraiment début Septembre. Nous devions faire quelque chose le 3 ... Est-ce que je serais morte là ? »

Pensive, son nez se retroussa. Elle ne posait pas vraiment la question au jeune homme et rouvrit les yeux en attendant d'autres indications. Cependant, repenser à la dernière date dont elle se souvenait lui laissait un drôle de goût dans la bouche. Être ailleurs était quelque chose, mais il était vrai qu'il y avait des gens laissés de l'autre côté.